Le charronnage "Adumeau"

Le charronnage ‘‘ADUMEAU’’, une affaire de famille.

L’histoire, de ces trois générations de charrons-forgerons qui se sont succédé, reconstituée grâce la fille du dernier charron qui nous a confié ses souvenirs et archives.

 

Les hommes :

- Camille Adumeau fils de charron s’installe rue Buttement en 1889. Il aura 6 enfants, dont Camille dit Léon qui lui succédera.

- Camille dit Léon, après avoir commencé son apprentissage dans cet atelier, travaille à Paris chez le constructeur automobile DELAHAYE avant de revenir travailler aux côtés de son père, installé dorénavant au 37 rue Gambetta. Il aura une fille puis un fils Robert qui naîtra à Bléré.

- Robert fait son apprentissage aux côtés de son père de 1935 à 1938, avant de devenir ouvrier jusqu’à avril 1948 où il exerce à son compte. 

 


 

L’activité :  

Leurs clients étaient locaux et même, à quelques exceptions près, blérois. Parmi eux, nous retrouvons toutes les classes sociales avec bien sûr les paysans mais également les ‘’propriétaires’’, les commerçants/artisans et industriels, la municipalité de Bléré, les écoles ou l’hospice avec la fabrication de tréteaux ou de selles à laver.

 

Leurs fournisseurs étaient également locaux : les menuisiers et/ou les scieries Poupeau, Reuillon et Guerive & Verry pour le bois. Honnet pour la quincaillerie.

 

Les fabrications :

Les principaux véhicules hippomobiles fabriqués et/ou entretenus sont des tombereaux, charrettes, carrioles, breaks, cabriolets, voitures ou charrettes anglaises. D’autres matériels sont également fabriqués comme des voitures à bras ou voitures à chiens.

Pour les petits matériels, citons des brouettes, échelles, selles à laver, diables, etc. Et pour les petits travaux, que l’on pourrait qualifier de quotidien, nous relevons des affûtages ou des réparations de scies à bûches, des affûtages de couteaux pour les bouchers ou la fabrication de manches d’outils divers.

Le charron se déplace chez les clients pour effectuer des graissages ou réparations sur les matériels. Beaucoup de réparations sur les brancards, avec la réalisation ’’d’entures’’ mais les interventions les plus courantes se font sur les roues, allant du tombereau à la voiture à chiens, avec essentiellement  l’opération de châtrage (1).

De 1960 à 1965, nous retrouvons plusieurs fabrications de dents de moulin ou alluchons pour le moulin des Ruaux ou celui du Vau (2).

 

Quelques exemples de prix en gardant en mémoire les nombreuses dévaluations et le nouveau franc en 1960 :

Une selle à laver coûtait 40 francs en 1929 et 6500 francs en 1963, une brouette coûtait 125 francs en 1931 et 1380 francs en 1943 et un tombereau coûtait 2250 francs en 1931 pour 10968 francs en 1943.

 

A partir des années 1929/1930, nous constatons une évolution dans les travaux du charron. En effet, les différents commerçants de Bléré s’équipant progressivement de véhicules automobiles, le charron, bien qu’il continue à fabriquer des voitures à chiens ou à bras ainsi que des tombereaux, commence à travailler sur ces véhicules automobiles.

 

A partir de la fin des années 1950, il n’y a plus de fabrication de gros matériels agricoles (charrettes ou tombereaux) mais seulement des réparations et des entretiens où nous verrons apparaître les roues à pneus dans les années 1955. Quant aux brouettes, la dernière

fabrication comprendra seulement 4 exemplaires de « brouettes de jardin » en 1966 avec l’apparition des roues en caoutchouc dès 1960.

Les réparations continueront jusqu’à l’année suivante en 1967. Quant à la fabrication de manches d’outils, elle s’arrêtera en 1966.

D’ailleurs, dans une enquête d’octobre 1982, Robert déclare avoir ferré des roues jusqu’en 1968 et continué à confectionner quelques brouettes, à temps perdu, pour son plaisir et pour ne pas perdre la main.

 

A partir des années 1963/1964, nous imaginons un changement dans la vie des blérois, ou nous devrions dire « des bléroises » car la demande en selles à laver devient celle de planches à laver. Ce changement s’explique, sans doute, par l’arrivée de l’eau courante dans les foyers impliquant un lavage du linge dans l’évier.

C’est également dans ces mêmes années que l’activité du charron évolue beaucoup. La diminution et l’extinction des fabrications de matériels agricoles obligent l’artisan à se tourner vers d’autres travaux et c’est naturellement qu’il s’oriente vers des travaux de menuiserie (mobiliers et portes et fenêtres).

Nous retrouvons à cette même période plusieurs chantiers de fabrication de meubles sous-éviers.

 

A partir de 1961, et chaque année au mois de mars, Robert réparait le char de la reine pour la cavalcade. Il a également réparé des bateaux.

Alors que ce métier vit « ses dernières heures », c’est dans les années 1970/1980 qu’il retrouve tout son sens pour Robert quand il est sollicité pour refaire entièrement l’ossature en bois de plusieurs voitures de collection :

-  une DELAHAYE Torpédo de 1924 (photo de gauche)

- une CITROËN Trèfle 5 chevaux de 1921 (photo de droite) 

- une SALMSON  


 

Robert, le dernier charron de Bléré, a cessé son activité en mars 1983. Dans son atelier, entre cour et jardin, tout était encore en place en 2019 jusqu’à ce que sa fille fasse don du matériel, des objets fabriqués restants et des stocks de bois et de fers à une association souhaitant faire revivre le patrimoine.